Ecrire ? Lire ? Fany Mesnier nous parle de l’appropriation de la langue maternelle…

17 novembre 2017

compte-rendu de conférence

Fany a terminé sa semaine à Caminarem par une conférence publique sur le thème de l’appropriation de la langue maternelle par les enfants, un questionnement récurrent dans les écoles. Et Fany interpelle : les pédagogues, dans les écoles Steiner-Waldorf, n’apprennent pas aux enfants à lire. Ils leur donnent les éléments pour que les enfants apprennent eux-mêmes à lire. Mais encore  ?

1ere classe. Rappelant que l’homme s’est longtemps passé d’écriture, le pédagogue va d’abord travailler l’oralité, la soigner. Raconter les choses. Raconter encore, raconter beaucoup. Raconter, mais aussi à chaque fois demander à l’enfant de restituer l’histoire en racontant à son tour. Ainsi l’élève apprend, par imitation, la narration : tenir un fil  ; un début, un développement, une fin. Et puis dire et faire des poèmes. Valoriser l’importance de la poésie, aussi, dans le langage  ! Et aussi : visiter tous les signes de l’alphabet pour retrouver ce que ces signes “disent“  : qu’y a-t-il dans le «  A  », dans le «  I  »  ? Dans le «  B  », dans le «  M  »  ? Plongée dans les sonorités, évocatrices d’images.

Ainsi ce n’est pas l’analyse des lettres le point de départ vers la lecture, mais l’image  : d’abord le pédagogue (et l’enfant) raconte. Puis on écrit ce qu’on a raconté, tous ensemble. Puis on observe  : il y a différentes phrases… différents mots. Reprenons chaque mot  : ah, il y a différentes syllabes… Ah tiens, des mots qui ont 2 sons… d’autres 3…Ah, mais dans ce son, il y a plusieurs lettres, lesquelles  ? Finalement le pédagogue part de ce que l’enfant connaît, de là où il en est, pour arriver jusqu’au détail des lettres.

Puis l’enfant est invité à écrire, écrire, beaucoup écrire, s’exprimer par écrit. L’adulte ne demande pas à l’enfant de tout de suite écrire correctement. Mais simplement d’écrire de telle sorte qu’il puisse se relire. On ne peut pas demander à un enfant de savoir bien exprimer ce qu’il a à dire, et en même temps de savoir comment écrire correctement et la lecture va venir…

La lecture va venir, le professeur restant attentif à ce que chaque enfant progresse, à tout moment. Si l’un ou l’autre rencontre des difficultés, le professeur l’accompagnera pour trouver un passage.

Vers les 9 ans des enfants, le pédagogue abordera petit-à-petit la grammaire… avec la ponctuation d’abord. Une question  ? Je suis sûre, les enfants, que vous avez tous une question à poser. Qu’est-ce qu’une question  ? Et on vit (du verbe vivre !) la question…

La nature des mots  ? Quel régal  ! qu’est-ce qu’un nom  ? Prenons Arthur. Il n’est pas du tout pareil que quand il était bébé. Et il ne sera pas pareil quand il sera vieux. Et pourtant c’est la même personne, il a le même nom  : le nom, c’est ce qui reste quand ça change  ! Et le pommier, au cours des saisons ?… c’est parfois difficile de reconnaître que c’est un pommier, il n’a pas de fruit, plus ses feuilles… et pourtant il est toujours un pommier  !

La grammaire n’est jamais abordée autrement qu’en faisant vivre une expérience. Et Fany est tellement enthousiaste, vit tellement ce qu’elle nous dit que les auditeurs peuvent un peu vivre de cette expérience.

Ces apprentissages de la langue maternelle sont finalement abordés dans tous les cours. Dans TOUS les cours le professeur raconte, puis écrit un texte. Dans tous les cours on fait du français, dans nos écoles…

Nous prenons du temps  ? Certes, beaucoup d’enfants vers 7 ans ne savent encore pas vraiment lire. Mais qu’est-ce que ces quelques mois que l’on prend en plus (prendre le temps  ! ! prendre le temps) au regard d’un apprentissage vivant, que l’enfant peut vraiment s’approprier, faire sien, pour toute sa vie  ?

Nous constaterons que la langue maternelle contribue largement à la construction de l’enfant depuis qu’il sait marcher. En écrivant et en découvrant de manière vivante la beauté de la structure du langage qu’il utilise, l’enfant reprend la main – en quelque sorte – et devient peu à peu co-créateur de son évolution.

Cécile Defèche, parent et administrateur de l’école